HMD Global/Nokia : "On ne se bat pas dans la même cour que Xiaomi et Oppo"

La start-up finlandaise HMD Global exploite la marque commerciale Nokia depuis 2016, année de cession des actifs par Microsoft à d'anciens salariés de la marque. Depuis cinq ans, elle tente de renouer avec son prestigieux passé, lorsque le groupe finlandais dominait le marché de la téléphonie mobile. Le monde d'avant les smartphones. "Il faut dépoussiérer la marque Nokia", explique Rémi Girault, directeur général France de HMD Global. Une opération qui a démarré par le retour d'une ancienne star du marché, le fameux 3310. Nokia s'est d'abord relancé avec les features phones, ces téléphones mobiles dédiés avant tout aux appels téléphoniques avant de devenir des plateformes multimédias. "Nous avons surfé sur la marque pour les nostalgiques", reconnaît Rémi Girault. Ce qui a permis à Nokia de redevenir le numéro un mondial sur le marché des features phones, un segment en décroissance, et de se lancer avec moins de succès sur celui des smartphones : le top mondial en matière d'expéditions est aujourd'hui occupé par Samsung, Apple, Xiaomi, Vivo, Oppo et Realme.

Pour faire face aux nouveaux acteurs chinois, comme les Xiaomi, Oppo et Vivo, qui ont profité des ennuis de Huawei pour grimper au classement mondial des vendeurs de smartphones, Nokia met en avant son identité de constructeur européen. "Nous voulons montrer que la marque est innovante et sécurisante", explique le directeur général, qui mise, en plus de sa notoriété, sur la longévité et la durabilité de ses produits pour aller séduire les jeunes clients qui n'ont pas grandi avec Nokia, tout en tâchant de conserver sa base de clients actuelle. Et il est encore bien conscient de ses limites. Le premium est pour le moment plutôt hors de portée, surtout avec les investissements que font les grands groupes. "On arrive à des limites", concède le directeur général. Malgré la présence d'un modèle XR20 à 569 €, "notre terrain de jeu est plutôt celui des appareils entre 100 € et 200 €", admet-il.

"On ne se bat pas dans la même cour que les marques qui viennent d'arriver", reconnaît-il par ailleurs.

Cap sur le BtoB

Autre objectif de la stratégie mise en place : le marché des professionnels. "Tout le monde y va", selon Rémi Girault. "Nous nous adressons à des gestionnaires de flottes qui recherchent une marque qui sache répondre aux exigences d'Android Enterprise Recommanded (AER). Le fait d'être AER permet d'asseoir un crédit qui est le résultat de notre partenariat très fort avec Google." HMD Nokia entend profiter de cet avantage pour gagner des parts de marché dans le BtoB, mais ce sont des processus qui sont longs et nécessitent beaucoup de ressources qu'il n'a pas pour le moment : pas d'équipe commerciale dédiée notamment. Cette ressource sera développée en 2022 et le BtoB s'apprête à faire l'objet d'un "focus énorme", assure Rémi Girault.

Nokia a récemment lancé une tablette, la T20 qui cible notamment les entreprises sans pour autant proposer un clavier et un stylet. Des manques pénalisants face à une concurrence mieux armée sur le sujet. Rémi Girault reconnaît qu'il faut améliorer l'offre sur ce marché, mais les premiers résultats de la T20 "nous donne envie d'aller plus loin".

HMD Global Nokia voit bien que les lignes ne sont pas figées. "Sur le marché des smartphones, tout est possible", analyse Rémi Girault. Il rappelle que des poids lourds comme LG s'y sont cassé les dents et que des Huawei ont disparu du top 5 en quelques mois après une décision prise par les autorités américaines, créant ainsi un appel d'air. Mais les places sont chères, et les moyens engagés colossaux. Et vivre sur une notoriété de marque, aussi forte soit-elle, mais qui s'étiole, ne peut être durable sur le long terme sans apporter des vrais ruptures.

Motorola, une autre gloire du passé, l'a bien compris. La marque rachetée par Lenovo tente encore et toujours un énième retour avec beaucoup de R&D, à l'image du smarpthone à clapet Razr, et pour des produits qui finissent par nous convaincre. Un modèle à suivre, donc, pour HDM Nokia ? "On a le même ADN puisque ce sont des marques […] 'dinosaures' sur le marché, qui ont un certain nombre d'années, qu'il faut dépoussiérer", poursuit Rémi Girault. Pour autant, "on n'est pas dans la même démarche", ajoute-t-il, soulignant des différences de produits et de stratégie marketing. La start-up européenne aura-t-elle les épaules suffisamment solides pour surprendre les consommateurs ? C'est l'enjeu des prochains mois.